Le projet initial de rédaction ne comprend que quatre membres: Leila Oliveira, Yannet Abebe, Hiromi Kimura, Chingis Batbayar. Mais la lecture des premières esquisses a donné à tous les autres l’envie de parler de leurs expériences et leurs impressions. Le livre sera signé par tous les membres de Notre Destin et sera publié le 15 mai 2075.
Oliver Anderson en rédigera la préface.
2010-2020 : le climat ou la révélation de la maladie de nos sociétés
2020-2030 : panique et décadence
2030 – 2032 : l’émergence
2032 et après : le développement
2035 – 2047 : la formation de la déferlante
2048 – 2060 : la déferlante et le changement
Les causes des révoltes sont intemporelles. Il y en a trois principales : le niveau de vie très insuffisant, l’insécurité générale, et le sentiment de ne pas être entendu et considéré par le pouvoir en place.
L’état général des populations dans le monde se dégradait de plus en plus à cause de l’appétit incontrôlé des grosses entreprises et de leurs actionnaires, de l’inaction et de la corruption des gouvernements, du changement climatique, de la disparition des ressources de la Terre et de la biodiversité. Les trois facteurs étaient omniprésents et des révoltes éclataient régulièrement dans tous les pays. Elles étaient réprimées plus ou moins brutalement selon les pays. Néanmoins, entre 2048 et 2051, à cause de l’urgence sanitaire, très peu de soulèvements ont eu lieu. Après 2051, la situation sanitaire semblait moins préoccupante, on aurait dû voir ressurgir de nouvelles vagues de révoltes, vu l’état catastrophique général des populations. Si on trace un histogramme du nombre de révoltes annuelles en fonction du temps, il est très clair qu’il y a eu une rupture qu’on aurait pu penser reliée à la situation sanitaire. Or cette rupture apparaît déjà en 2046. Une analyse plus fouillée des causes possibles a fait apparaître une composante extrêmement intéressante : le nombre d’ASBL créées sous l’égide de Notre Destin explosait littéralement depuis 2045, comme si les citoyens s’étaient subitement réveillés et avaient décidé de prendre leur vie en main, en dehors des pouvoirs publics. On a vu fleurir partout des coopératives vivant avec leur monnaie propre, avec des cours d’échange entre monnaies locales, des marchés de troc, des associations d’aide aux démunis. Avec pour conséquence une fiscalité officielle qui perdait beaucoup car pas mal d’opérations restaient non officielles, locales, pour le bien des citoyens de l’endroit. Cet état d’esprit de collégialité et d’entraide a fait baisser le niveau de désespoir des gens et leur a rendu le goût de vivre. Avec pour conséquence un niveau de violence largement moindre. En 2052, dans deux pays, toute la population a boycotté les élections, les urnes officielles sont restées vides, mais des urnes locales avaient été organisées, des élus locaux étaient apparus et s’étaient ensuite consultés pour constituer un nouveau gouvernement. Pas très légal tout ça, mais l’armée et la police étaient derrière eux et les partis traditionnels ont par la suite été dissous. Ces deux cas ont tellement effrayé les autres pays que des restructurations drastiques et des nouveaux partis et candidats populaires ont pris le relai, avec l’espoir d’une politique plus citoyenne. Il est certain qu’aujourd’hui, la classe politique doit tenir compte de Notre Destin et de l’impact des citoyens sur la vie collective.
« Nous avons lancé une grosse pierre dans l’océan, d’autres nous ont imités, avec, pour résultat, une énorme vague commune s’échouant sur les rivages du monde. Aujourd’hui, nous nous sentons minuscules, humbles devant cette vague qui porte notre nom. »